Kayhan Kalhor : L’Âme du Kamancheh et le Son d’un Monde Sans Frontières
- Isabelle Karamooz

- 28 oct.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 29 oct.
Mêlant le mysticisme de la musique classique persane à l’universalité de la collaboration artistique, le maître Kayhan Kalhor transcende les frontières et les langues, invitant le public à une conversation intemporelle entre les cultures.
Peu de musiciens savent faire jouer avec expressivité un instrument ancien avec autant d’intimité, de mystère et d’universalité que Kayhan Kalhor, le maître iranien du kamancheh — cet instrument à archet dont les notes résonnent depuis des siècles dans les cours royales et les villages de Perse. Nommé quatre fois aux Grammy Awards et membre fondateur du Silkroad Ensemble de Yo-Yo Ma, Kalhor a bâti des liens entre les mondes musicaux, portant l’âme de la musique classique persane des salles de concert de Téhéran à Tokyo, de Bamako à New York.

L’art de Kalhor transcende la géographie. "J’aime écouter et découvrir la musique du monde entier," confie-t-il. "Parfois, je recherche des musiciens avec lesquels je ressens une affinité musicale, culturelle ou artistique. Le lien se crée naturellement lorsque je rencontre une musique, une tradition ou un artiste qui partage certaines des sensibilités de ma propre culture." Cette philosophie guide ses collaborations avec des artistes aussi variés que Yo-Yo Ma, Toumani Diabaté, le Kronos Quartet ou Shujaat Khan. Sa curiosité musicale est sans limites, et chacune de ses rencontres révèle les fils invisibles qui relient les traditions musicales entre elles.
"C’est fascinant de constater à quel point les cultures se rejoignent lorsqu’on écoute attentivement," explique Kalhor. "Avec Toumani Diabaté, j’ai beaucoup appris sur la musique ouest-africaine et sur la similitude de certains modes avec ceux de ma propre tradition. Et avec Shujaat Khan, j’ai découvert la richesse de la musique classique indienne et la manière d'élaborer des superpositions sonores et des textures musicales." Chaque collaboration devient un dialogue — à la fois étude et rencontre spirituelle — à travers lequel Kalhor redécouvre sa propre tradition et sa place dans le monde.
Au cœur de la musique de Kalhor se trouve un lien profond avec le patrimoine spirituel et poétique de l’Iran. La musique classique persane, comme les vers de Rumi ou de Hafez, cherche à transcender le quotidien pour atteindre le divin. "Cela vient naturellement, grâce à la culture ancienne et magnifique dont je suis issu," dit-il. "La culture iranienne reste intimement liée à notre passé spirituel, et notre musique comme notre poésie demeurent à la fois profondes et universelles." Pour Kalhor, la musique n’a pas vocation à transmettre un message, mais à créer une connexion : "Je ne cherche pas à délivrer un message précis, mais à établir un lien avec les gens. J’espère que ma musique les touchera et les emmènera vers un lieu magique et hors du temps."

Cet automne, le 30 novembre, Kalhor fera son grand retour au Town Hall de New York, marquant son premier grand concert de musique classique persane dans la ville depuis plus de dix ans. Pour lui, ce n’est pas simplement une performance, mais un véritable retour aux sources. "Rejouer à New York, et au Town Hall en particulier, est très excitant pour moi," confie-t-il. "Je me produis dans le monde entier, mais rarement à New York, où j’ai vécu de nombreuses années. J’adore l’acoustique chaleureuse de cette salle et le public new-yorkais, si réceptif à la musique."

Tickets pour le concert du 30 novembre à New York City :
À une époque marquée par l’incertitude mondiale, Kalhor voit dans la musique l’un des derniers langages purs de l’unité. "Il est si important, compte tenu de la complexité du monde actuel, de rassembler les amateurs de musique autour d’une soirée dédiée à la musique classique persane," réfléchit-il. Le concert réunira deux de ses collaborateurs de longue date : Kiya Tabassian au setar et Behrouz Jamali au tombak. "Kiya a été mon élève pendant de nombreuses années ; il me connaît très bien et c’est un artiste d’une grande intuition. Behrouz est un excellent joueur de tombak, d’une grande sensibilité, avec qui j’ai souvent partagé la scène. Nous nous comprenons à merveille et avons hâte de rejouer ensemble. Cela rend cette soirée au Town Hall d’autant plus spéciale."
Le kamancheh de Kalhor est à la fois sa voix et sa boussole. "Mon instrument possède une qualité respirée, presque humaine, et sa sonorité unique lui permet de toucher directement l’auditeur," explique-t-il. Son timbre semble parler au cœur — parfois en murmurant, parfois en pleurant — portant dans ses cordes vibrantes des siècles de nostalgie, d’exil et de résilience persane.

Bien qu’il reste profondément ancré dans la tradition, Kalhor n’a jamais eu peur d’innover. "Je suis profondément enraciné dans la musique classique persane ainsi que dans les musiques régionales de mon pays, mais j’ai aussi étudié la composition occidentale," précise-t-il. "Je suis un citoyen du monde, exposé à tant de musiques différentes. Il est passionnant pour moi de créer des œuvres nouvelles qui prennent racine en Iran tout en s’ouvrant au monde." Cette ouverture définit son approche de la composition comme de l’interprétation — un dialogue créatif entre patrie et horizon.
À une époque où les frontières se durcissent, la musique de Kayhan Kalhor nous rappelle une vérité essentielle : la beauté et la vérité peuvent circuler librement entre les cultures. À travers les notes du kamancheh, il nous invite à écouter — non seulement les sons, mais aussi les uns les autres.

Site officiel : https://kayhankalhor.net
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