Parution de “Rares sourires” : Alexia Guggémos à la poursuite d’une émotion insaisissable
- Laurence de Valmy

- il y a 6 jours
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Et si le plus beau des mystères de l’art tenait dans un simple sourire ? Dans Rares sourires – Enquête dans les musées du monde, paru en novembre 2025, la critique d’art et pionnière du numérique Alexia Guggémos explore cette émotion universelle, si rare sur les toiles et pourtant si essentielle à notre humanité.

Dans les galeries des musées, les visages s’alignent, graves, hiératiques. Et soudain, un sourire. Fugace, timide, presque accidentel. C’est cette apparition fragile qu’Alexia Guggémos traque depuis trente ans. Dans Rares sourires – Enquête dans les musées du monde, à paraître en novembre 2025 chez Édilivre, la critique d’art part sur les traces d’une émotion universelle et pourtant étrangement absente de l’histoire visuelle.
« Le sourire traverse les siècles comme une apparition fugitive », écrit-elle dès les premières lignes.
Du trait préhistorique aux pixels contemporains, Alexia Guggémos explore les formes, les symboles et les interdits du sourire dans les cultures du monde. Pour elle, sourire, c’est se laisser traverser, un mouvement intérieur que l’art, trop souvent, a voulu retenir. Peut-être est-ce pour cela qu’il est si rare : parce qu’il échappe à la pose, à la fixité, au contrôle.
Ni essai académique ni carnet de voyage, Rares sourires se lit comme une méditation lumineuse sur la sincérité et la fragilité. Dans un monde saturé d’images et de selfies, l’autrice revendique la nuance et la retenue.
« Je n’ai jamais cherché les grands éclats. J’ai cherché les petites lumières », écrit-elle.
Ces petites lumières jalonnent son livre, autant de sourires rares mais essentiels, capables d’éclairer autrement notre rapport à l’art et à l’humanité.

Le Musée du Sourire : une utopie devenue réalité
Alexia Guggémos n’en est pas à sa première exploration du sujet. En 1996, elle fonde le Musée du sourire, le premier musée virtuel au monde consacré à cette émotion. L’idée germe un jour de grève dans un autobus parisien, lorsqu’elle rencontre une jeune femme n’ayant jamais visité le Louvre. De ce hasard naît un concept : un parcours des « dix plus beaux sourires du Louvre » qui deviendra, peu à peu, une réflexion sur le sourire dans l’art.
Inauguré au Web Bar à Paris, le musée s’est imposé comme un laboratoire poétique et numérique. Concerts à la Villa Médicis, Journées du sourire, concours photo et Festival du sourire, dont le jury, présidé par Sabine Weiss, récompensa en 2009 l’artiste Anthony Asael pour ses portraits d’enfants réalisés avec l’UNICEF.
En 2022, l’institution virtuelle s’est incarnée dans un lieu physique rue des Lévis, à Paris. Aujourd’hui, le Musée du sourire ouvre ses portes sur rendez-vous, accueillant amateurs d’art, chercheurs et curieux désireux de découvrir cette collection singulière qui désormais voyage.
« Percer le mystère du sourire, c’est franchir les portes d’un musée inattendu », écrivait La Vie en 2020.

Des visages et des histoires
Le musée rassemble des œuvres d’artistes aussi variés que Sabine Weiss, Andres Serrano, Orlan, Roman Cieslewicz ou Banksy. L’Américain Nari Ward y dialogue avec la photographe Agnès Winter, qui a projeté une centaine de visages souriants de New-Yorkais sur la façade du Rockefeller Center. Et dans la pierre gothique, Alexia Guggémos débusque une troublante correspondance : celle de l’Ange au sourire de Reims et du Tentateur de la cathédrale de Strasbourg, son double ironique et machiavélique.
Chaque œuvre, qu’elle soit sacrée, urbaine ou numérique, devient pour elle un miroir de notre humanité. Le sourire s’y fait trace, vibration, promesse.
Un sourire pour demain
À travers son livre “Rares sourires” comme à travers son musée, Alexia Guggémos nous invite à ralentir le regard. À préférer aux éclats les nuances. À redécouvrir, derrière chaque visage, la beauté fragile d’un sourire, ce geste minuscule qui relie les œuvres, les époques et les êtres.
Quelques oeuvres dans la collection du Musée du sourire (photos : Alexia Guggémos)
de gauche à droite: Dismaland de Banksy
Projection de sourires sur le Rockfeller Center par Agnès Winter
Canned Smiles de Nari Ward
Keith three eyed face de Laurence de Valmy


















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